Président du Tribunal de Commerce de Lille Métropole, Eric Feldmann revient sur l’accompagnement des entreprises en difficulté.
Le Tribunal de Commerce a pour fonction de protéger les entreprises et assurer la pérennité des activités économiques dans son bassin d’emploi. « J’assimile souvent le Tribunal de commerce à un centre hospitalier judiciaire pour remettre sur pieds les entreprises qui souffrent des différents bobos de la vie. »
En 2023, la fin du « quoi-qu’il en coûte » a marqué un retour à la situation pré-Covid, avec un nombre de dépôts de bilan avoisinant celui que connaissait le bassin de la métropole en 2019. La perspective économique est cependant bien différente, affectée par les augmentations brutales des taux d’intérêt, un renchérissement du crédit, l’augmentation des coûts de l’énergie consécutivement à la guerre en Ukraine, l’augmentation du fret maritime, le renchérissement des matières premières, une baisse de la consommation liée à l’inflation, et des difficultés à recruter. Un contexte économique délétère qui touche particulièrement le secteur du bâtiment, la restauration, le retail prêt-à-porter et les start-ups.
Alors comment anticiper les difficultés pour mieux se protéger ? « Il faut sensibiliser le chef d’entreprise au fait qu’il existe des dispositifs pour éviter le dépôt de bilan. Ces procédures sont strictement confidentielles, donc l’entreprise pourra repartir du bon pied sans que ses salariés n’entendront jamais parler des difficultés conjoncturelles de leur entreprise. »
Eric Feldmann dresse un constat lucide sur la solitude du dirigeant. « Un dirigeant qui éprouve des difficultés est souvent taisant. Il se replie sur lui-même et se recroqueville dans le déni par rapport à la réalité de ses difficultés, notamment dans l’analyse de son business model. Il est seul et n’ose pas en parler. Et c’est justement ce qui ne faut pas faire. Il faut au contraire rester attaché à des réseaux, prendre langue avec des collègues, avec des amis, pour parvenir à trouver les bons moyens légaux pour sortir de cette situation. » Face à la détresse psychologique des entrepreneurs en souffrance aiguë, la structure APESA permet de prendre en charge ces dirigeants en une heure de temps pour éviter que ne survienne le pire.
En conclusion, le Président du tribunal de commerce adresse quelques conseils aux chefs d’entreprise : « Tous les jours, vous devez vérifier deux points : est-ce que votre trésorerie est aisée ? Et est-ce que votre business model est toujours bien en phase avec les attentes actuelles et futures du marché ? »